1. Contexte
Les variations de qualité et quantité de Matière Organique (MO) influencent l’efficacité des procédés du traitement biologique dans les Station de Traitement des Eaux Usées (STEU). La MO est caractérisée par des mesures de Demande Biochimique en Oxygène (DBO5) et de Demande Chimique en Oxygène (DCO) qui sont chronophages, coûteuses, et ne peuvent être appliquées in situ et en temps réel. La connaissance en temps réel des concentrations en carbone organique biodégradable, en amont du traitement biologique permettrait une meilleure gestion des procédés et la réalisation d’économies de réactifs chimiques (ex : méthanol) ou encore d’énergie (ex : pompage, aération).
La spectroscopie de fluorescence est une méthode de mesure rapide (de l’ordre de la minute) qui permet de distinguer différents types de matière organique dissoute (MOD) et donne des informations sur sa nature chimique. Des travaux menés au LEESU ont démontrés le potentiel d’application de cette méthode pour se substituer aux mesures de DBO5 et DCO (Goffin et al., 2018 ; 2019). Une sonde de mesure in situ et à haute fréquence nommée « Fluocopée » permettant la mesure de plusieurs dizaines de fluorophores a été développée entre 2018 et 2021 au LEESU et au SIAAP (brevet déposé).
Le premier déploiement industriel de cette sonde (Thèse N. Musabimana) a été mené dans le cadre de la phase 2 du programme de recherche « Mocopée », en sortie de décantation à la STEU Seine Aval (depuis Janvier 2022) et va permettre d’ajuster le fonctionnement de traitement biologique grâce aux mesures rapides de DBO5 (Varrault et al., 2021). D’autres déploiements de cette technologie innovante de suivi de la MO sont prévus dans les filières de traitement des eaux usées et des boues.
En effet, la gestion des procédés de valorisation des boues de STEU représente un enjeu clef pour la production d’énergie renouvelable. Au SIAAP, la filière de Digestion Anaérobie (DA) admet plus de 70% des boues produites, permettant chaque année la production de plus de 80 millions de mètres cubes de biogaz. Pour estimer le potentiel méthanogène des boues, le « Biochemical Methane Potential » (BMP) est couramment employé mais cette mesure est lourde (30 jours de suivi analytique) à mettre en place. Des travaux récent du LEESU (thèse M.Dechesne) ont permis de démontrer l’intérêt de la spectrofluorescence pour prédire le BMP des boues épaissies, ouvrant la voie à une caractérisation en ligne, en temps réel et à hautre fréquence des boues d’épuration.
Ces travaux de thèse constitueront le premier retour d’expérience sur le déploiement d’un réseau de capteurs de mesure par fluorescence (in situ et à haute fréquence) permettant l’obtention d’indicateurs de performance de traitement (DBO5 et DCO) et de caractériser la MO à différentes étapes du traitement des eaux usées (filière eau et filière boue). Ces informations seront des éléments clef d’aide à la décision pour le pilotage des procédés et aideront à l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD) des nations unies en permettant une amélioration de la qualité des eaux rendues aux milieux récepteurs tout en permettant une consommation responsable des ressources (réactifs, énergie).
2. Objectifs
Axe 1 – Déploiement de sondes « Fluocopée » pour le suivi et l’optimisation des procédés épuratoires de la filière des eaux usées : mesures à haute fréquence, in situ et en temps réel de la MO, DBO5 et DCO.
Pour suivre les qualités et quantités de matière organique fluorescente, ainsi que les valeurs de DCO et la DBO5 (in situ et haute fréquence) le long de la filière eau d’une STEU, un ensemble de sondes « Fluocopée » sera déployée en entrée de STEU (eaux usées brutes) et en sortie du traitement biologique.
Des modèles de prédiction de la DCO et la DBO5 obtenus par mesures de fluorescence seront développés pour ces étapes de traitement à l’aide de mesures contradictoires notamment dans des périodes transitoires (temps de pluie) pour lesquelles nous n’avons à l’heure actuelle pas de modèles prédictifs établis.
L’étude des chroniques de suivi de ces paramètres en temps réel, permettra de définir des seuils d’alerte pour l’aide à la gestion des procédés épuratoires.
Axe 2 – Vers une meilleure compréhension des caractéristiques de la MO fluorescente des eaux usées.
Bien que la spectrométrie de fluorescence apporte un moyen de caractérisation globale facile d’application sur la qualité de la MO présente (substances humiques ; proteiniques ; etc.), les caractéristiques de la MO d’origine urbaine fluorescente restent encore mal connues, avec des contributeurs potentiels tels que les produits de dégradation de la lignine, les quinones, les flavonoïdes, les acides humiques et les agents de blanchiment fluorescents (FWA) provenant des eaux usées municipales (aliments, plantes, microbes, champignons, détergents pour le linge, produits sanitaires, papier toilette et mouchoirs) et de l’industrie papetière (Carstea et al., 2016), ainsi que des composés de type protéinique liés à la présence de détergents, produits de soins personnels, résidus médicamenteux ou encore la caféine (Sgroi et al. 2017).
Ce volet de thèse aura pour objectif de relier les propriétés de fluorescence de la MO urbaine à un ensemble des données structurelles spécifiques et descripteurs physico-chimiques/biologiques. Les échantillons étudiés proviendront de différents bassins versants, et d’entrées/sorties de STEU. Un focus sera fait sur les caractéristiques des différentes classes de tailles de la MO dissoute afin de prendre en compte la diversité des colloïdes organiques. Sur chacune des fractions obtenues, des tests d’incubations par respirométrie seront mis en œuvre pour obtenir leur potentiel biodégradable.
Axe 3 – Déploiements de sondes « Fluocopée » pour l’optimisation de la digestion anaérobie des boues de STEU : suivi MO ; BMP et propriétés de rhéologie.
Les travaux entrepris au LEESU depuis 2017 seront poursuivis pour valider l’utilisation de la spectrofluorescence pour caractériser les boues via leurs centrats en sortie de l’étape de centrifugation. Les modèles prédictifs des paramètres physico-chimiques des boues (BMP, teneur en AGV,…) seront donc finalisés dans la cadre de cette thèse. En outre, la possibilité d’estimer, grâce à des mesures de fluorescence, les propriétés rhéologiques des boues ainsi que leur déshydrabilité sera investiguée.
3. Cadre et partenaires du projet
La thèse sera encadrée par Gilles Varrault (Enseignant-chercheur et directeur adjoint du LEESU) et Angélique Goffin (Enseignante-chercheuse) au LEESU. Le doctorant sera basé dans les locaux de la Maison des Sciences de l’Environnement sur le campus centre de l’UPEC à Créteil.
Ces travaux de recherche seront menés en étroite collaboration avec la direction de l’innovation du SIAAP dans le cadre du programme de recherche MOCOPEE.
Les expérimentations seront menées à l’échelle industrielle aux niveaux des zones inneauvation de la STEU de Seine aval du SIAAP voire sur d’autres STEU en France.
La thèse commencera le 1er octobre 2023 et le financement est déjà acquis.
4. Profil recherché
Master ou diplôme d’ingénieur dans le domaine de la physico-chimie de l’environnement. Le candidat devra avoir des compétences en chimie de l’environnement (traitements des eaux) et en chimie analytique. Le candidat devra présenter un goût affirmé pour le travail expérimental en laboratoire et sur le terrain ainsi que le travail en équipe dans un contexte partenarial fort (Université/Industriel). Des compétences en traitement statistiques des données seront appréciées.
5. Candidature et contacts
Envoyer avant le 15 mai 2023 un CV, une lettre de motivation, les relevés de notes depuis le baccalauréat et les éventuels rapports de stage déjà rédigés aux adresses suivantes :
Gilles Varrault - varrault[at]u-pec.fr
Angélique Goffin - angelique.goffin[at]u-pec.fr
Offre de thèse (fichier PDF)