Calendrier : 2022 – 2024
Financement : action européenne Marie Curie
Présentation (English version below)
Les pratiques agricoles « conventionnelles » actuelles, notamment dans les pays occidentaux, font appel à de grandes quantités d’énergie et de ressources fossiles ou abiotiques pour produire des engrais de synthèse. Comme la plupart des nutriments extraits lors des récoltes ne sont pas ramenés au sol, de nombreux agriculteurs dépendent de ces engrais. Ce système linéaire et extractif a perduré à un coût social et environnemental élevé dans le monde entier.
Comme il fonctionne en circuit ouvert, il a des conséquences désastreuses, avec des perspectives de pénurie de phosphate, et de grandes quantités d’énergie investies pour produire les engrais ou pour traiter les nutriments une fois qu’ils se retrouvent dans les eaux usées. En outre, comme elles ne reconstituent pas le contenu organique du sol, les pratiques conventionnelles basées sur les engrais minéraux entraînent une perte importante de biodiversité, l’érosion et la salinisation des sols ainsi que le lessivage des nutriments. Enfin, les régimes alimentaires à base carnée dans les plus grandes économies, notamment aux États-Unis et en Europe, entraînent une pression inutile sur les systèmes alimentaires, car l’alimentation des animaux d’élevage gonfle l’utilisation des terres et des nutriments.
Dans un monde de plus en plus urbain, la séparation à la source des biodéchets et leur valorisation seront probablement essentiels à la viabilité à long terme des systèmes agri-alimentaires et de gestion des déchets. En effet, la transformation des déchets alimentaires et des excréments humains peut fournir des ressources inestimables telles que le compost, les engrais ou l’énergie et, à terme, supprimer la dépendance aux engrais de synthèse.
Le projet CAFE développera donc des scénarios prospectifs pour l’utilisation des biodéchets, en étudiant les impacts potentiels de la valorisation des nutriments et sa capacité à amener le système agri-alimentaire sur la voie de la circularité. À cette fin, nous évaluerons la possibilité de changements alimentaires (faible consommation de viande et régimes à base de plantes) ainsi que des pratiques agro-écologiques et à faible utilisation d’engrais, et nous les comparerons aux situations habituelles. L’objectif sera d’évaluer la faisabilité technique de chaque scénario et de quantifier dans quelle mesure ils peuvent améliorer la durabilité agri-alimentaire.
Le travail préliminaire sur une bibliothèque python pour quantifier les ressources biologiques est disponible ici.
Quelques chiffres et raisonnements importants
Le monde utilise environ 100 Mt d’azote par an et 40 Mt de phosphore et de potassium (respectivement dix et quatre fois les quantités utilisées dans les années 50 et 60). Cette surconsommation de nutriments, utilisés avec une très faible efficacité, a de graves répercussions sur l’environnement. La valorisation des excréments humains permettrait de fournir environ 30 MtN, 3 MtP et 5 MtK par an, ce qui représente une fraction significative des besoins agricoles avec des taux d’application et une efficacité plus raisonnables. C’est particulièrement crucial pour le phosphore, qui est une ressource limitée et qui est en grande partie perdu en mer avec les pratiques actuelles. Pourtant, comme Isaac Asimov l’a dit un jour, « [N]ous pouvons peut-être remplacer le charbon par l’énergie nucléaire, le bois par le plastique, la viande par la levure et l’isolement par la convivialité, mais le phosphore ne peut être ni remplacé ni remplacé ».
La gestion des eaux usées est une source majeure de consommation d’énergie pour les services publics des villes, représentant environ 20% de la consommation d’électricité. Environ 90% de la consommation d’énergie est associée au traitement (80%) et à l’élimination finale (10%) des « déchets » présents dans les eaux usées [Stricker2018]. La récupération des excréments humains avant qu’ils ne finissent dans les eaux usées présente donc un potentiel important d’économies d’eau et d’énergie [AboutNitrogen]. Par ailleurs, le projet donne la priorité aux applications agricoles (plutôt qu’énergétiques) des excréments car, si leur potentiel énergétique représente moins de 1% de la consommation occidentale actuelle (5 kWh/cap/jour en moyenne), ce sont des ressources irremplaçables si l’on veut cultiver des aliments sur des sols sains.
[Stricker2018]
Consommation énergétique des filières intensives de traitement des eaux résiduaires urbaines. Journées Information Eaux (23e édition)
[AboutNitrogen]
Dans le système actuel, nous consommons beaucoup d’énergie pour convertir l’azote de l’air (N2) en ammoniac (NH4) pour fabriquer des engrais au début de la chaîne, puis nous consommons encore beaucoup d’énergie pour dénitrifier les eaux usées en reconvertissant l’azote en N2 dans les stations d’épuration, une fois qu’il a été évacué dans nos toilettes.
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Summary
This work is done in collaboration with members of the OCAPI project, which you can also follow on the Fediverse.
Preliminary work on a python library to quantify organic resources is available here.
The world uses around 100 Mt of nitrogen per year and 40 Mt of phosphorus and potassium (respectively a ten and four times the amounts used in the 50s and 60s). This overconsumption of nutrients, used with very low efficiency, has severe environmental impacts. Recovering human excreta would provide around 30 MtN, 3 MtP, and 5 MtK per year, which is a significant fraction of agricultural needs with more reasonable application rates and efficiency. This is especially crucial for phosphorus, which is a finite resource and is mostly lost at sea with current practices. Yet as Isaac Asimov once warned, “[W]e may be able to substitute nuclear power for coal, and plastics for wood, and yeast for meat, and friendliness for isolation – but for phosphorus there is neither substitute nor replacement”.
Wastewater management is a major source of consumption in cities’ public services, representing around 20% of the electricity consumption. Around 90% of the energy consumption is associating to the treatment (80%) and final disposal (10%) of the sewage “waste” [Stricker2018]. Recovering human excreta before they end up in sewage has thus some major potential for water and energy savings [AboutNitrogen]. Furthermore, the project gives priority to agricultural (rather than energetic) applications for excreta because, while their energetic potential represents less than 1% of current Western consumption (5 kWh/cap/day on average), they are irreplaceable resources if one wants to grow food on healthy soil.
[Stricker2018]Consommation énergétique des filières intensives de traitement des eaux résiduaires urbaines. Journées Information Eaux (23e édition)
[AboutNitrogen]In the current system, we pay a lot of energy to convert N2 from air into ammonia to make fertilizer at the beginning of the chain, then pay again a lot of energy to denitrify wastewater by converting the nitrogen back to N2 in the treatment plants, once it’s been flushed down our toilets.